Décriés, considérés comme à l’origine de nombres de troubles, les jeux vidéos sont pourtant maintenant inscrits dans le paysage sociétal, et sont en passe de devenir le support artistique le plus rentable, le plus utilisé dans le monde. A cet égard, il ne semble pas opportun de les interdire, de les bannir du discours, mais plutôt, plus pertinent de les utiliser dans le cadre même de l’accompagnement psychologique que nous proposons.
Je me souviens de ce jeune que l’on m’avait adressé, qui se montrait farouchement opposé à la rencontre d’un psychologue. Ceci ne faisait pour lui aucun sens et il ne se retrouvait nullement dans la symptomatologie qui avait conduit les parents à me contacter. Pour lui en effet, il n’était point isolé, puisqu’au contraire, il était chef d’une guilde d’un MMORPG, animant avec force celle-ci, faisant preuve d’une grande capacité diplomatique pour réguler les conflits internes et externes, à son groupe de joueurs. Il me semble que le point d’achoppement était plutôt celui d’une porte de communication entre ce jeune et ses parents, ces derniers ne pouvant accéder au discours de leur enfant. Le travail s’est alors articulé plutôt sur l’accompagnement familial global dans une approche plutôt systémique.
C’est le point central que nous défendons ici : le virtuel auquel le jeu vidéo se réfère n’est nullement de l’irréel. Il constitue plutôt une articulation Borroméene, pour faire du Lacan dans le texte. Ce média recours réfère tantôt au réel, de par l’implication psycho, émotionnelle, corporelle qu’elle implique, mais encore imaginaire, tant le personnage que l’on incarne est source de multiples identifications, et enfin symbolique par la structure narrative qu’elle met en oeuvre. En ce sens donc, nous défendons l’idée que l’usage des jeux vidéos peut détenir une véritable dimension cathartique, pour autant que l’on lui donne sa pleine place, pour autant que l’on entende aussi dans a pratique, comme le sujet s’y engage.
C’est justement la difficulté intrinsèque, le jeu vidéo implique la personne tout entière, et l’on aurait tôt fait de s’y glisser pleinement. Ceci est d’autant plus vrai que la pratique est source de multiples récompenses : directement parce que l’on récupère tel ou tel « stuff », équipement, et plus insidieusement, agrémentant notre parcours de sons qui concourent à notre conditionnement. C’est là toute la difficulté, de permettre de trouver un équilibre satisfaisant pour le jeune, comme pour sa famille, afin que le jeu vidéo soit utilisé de manière adéquate : ceci implique une régulation, en termes de durée de pratique déjà, mais aussi en termes de contenu en proposant un matériel ajusté aux capacités cognitives, émotionnelles de l’enfant. Dans le même sens, les parents doivent tout autant s’ajuster, et si le jeu implique, il est nécessaire pour eux de comprendre qu’il n’est pas toujours possible de couper le jeu au coeur d’une action spécifique, au coeur d’une cinématique, sans sauvegarde préalable et donc de tolérer une certaine marge de manoeuvre dans le cadre proposé.
Je conclurai ce petit point en soulignant que les jeux vidéos sont un formidable outil dès lors qu’il permet de stimuler les compétences cognitives, réflexives, les réflexes, l’expression des émotions. Pour autant, ils nécessitent un bon accompagnement en termes de régulation, pour lequel les parents doivent maintenir leur rôle de régulation, confirmer leur rôle de régulateur et de médiateur face à un média qui engage tout entier.
Parents, enfants, jouez donc aux jeux vidéos, mais ENSEMBLE, pour profiter au mieux de ce formidable outil.
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